Canicule et fortes chaleurs : que doivent faire les RH ?
Travailler à 32 °C sur un chantier, dans un entrepôt ou un open space sans ventilation adéquate n’est pas sans risque. Malaises, baisse de vigilance, erreurs de manipulation, aggravation de pathologies : les fortes chaleurs représentent un danger professionnel réel, reconnu par le droit luxembourgeois.
Selon les articles L.312-1 à L.312-8 du Code du travail, l’employeur a l’obligation d’évaluer les risques professionnels et de garantir la santé et la sécurité de l’ensemble du personnel. Cela inclut l’adaptation des conditions de travail en période de canicule.
Anticiper les épisodes de chaleur
Dès que MeteoLux émet une vigilance chaleur ou que les températures intérieures dépassent 30 °C, il est fortement recommandé de déclencher un plan canicule en entreprise. Ce plan doit couvrir tous les salariés, y compris intérimaires, stagiaires et télétravailleurs, selon leur situation de travail.
Une attention particulière doit être portée aux populations sensibles : femmes enceintes, jeunes travailleurs, personnes âgées ou atteintes de maladies chroniques.
Les femmes enceintes bénéficient d’une protection spécifique en droit luxembourgeois. En cas de fortes chaleurs, l’employeur doit évaluer les risques liés au poste et mettre en œuvre des mesures adaptées : réduction du temps de travail, aménagement du poste, télétravail ou dispense temporaire en lien avec le médecin du travail. Cette obligation relève de l’article L.331-1 du Code du travail.
Questions fréquentes
- Quand déclencher le télétravail préventif ?
Dès 29-30 °C annoncés dans des bureaux sans climatisation efficace. Prévenir les salarié(e)s la veille par e-mail. - Doit-on rémunérer les pauses d’hydratation ?
Oui, si elles sont imposées pour des raisons de santé, elles font partie du temps de travail. - Un salarié peut-il refuser de travailler en cas de canicule ?
Un salarié ne peut pas refuser unilatéralement de travailler en invoquant la chaleur, sauf en cas de danger grave et imminent pour sa santé. Il doit alors en informer l’employeur ou les délégués à la sécurité. Ce droit de retrait est prévu par l’article L.312-4 du Code du travail. L’ITM peut être saisie en cas de désaccord. Le simple inconfort thermique ne justifie pas une absence non autorisée. - Que se passe-t-il si l’employeur ferme le site à cause de la chaleur ?
Si l’employeur décide de suspendre l’activité pour des raisons de sécurité, cette période est assimilée à du temps de travail rémunéré ou peut, dans certains cas, faire l’objet d’une demande de chômage intempéries. Les salarié(e)s ne doivent pas perdre de salaire par décision unilatérale de l’employeur liée à la canicule. - Le port d’un uniforme peut-il être assoupli en cas de forte chaleur ?
Oui. L’employeur peut adapter les règles vestimentaires (ex. : autoriser des vêtements plus légers ou de couleur claire) lorsque les conditions climatiques rendent le port de l’uniforme inconfortable ou dangereux. Ces adaptations doivent rester compatibles avec l’image de l’entreprise et les règles d’hygiène et de sécurité. - Doit-on aménager les postes pour les femmes enceintes pendant la canicule ?
Oui. Le Code du travail impose des mesures spécifiques pour protéger la santé des femmes enceintes. En cas de fortes chaleurs, un aménagement du poste ou un placement en télétravail peut être envisagé. Si cela est impossible, une dispense temporaire de travail peut être décidée en lien avec le médecin du travail. - Peut-on interdire certaines tâches physiques à cause de la chaleur ?
Oui. L’employeur peut suspendre ou reporter certaines activités jugées dangereuses (manutention lourde, travail en toiture, usage d’outils bruyants, etc.), si les conditions climatiques le justifient. Cette décision relève de l’obligation légale de protection de la santé du personnel. - Une entreprise sans climatisation est-elle en infraction ?
Non, la climatisation n’est pas obligatoire. Mais l’employeur doit garantir des conditions de travail sûres et décentes. Si la température intérieure devient excessive, d’autres solutions doivent être mises en place : ventilation efficace, stores, pauses fréquentes, réorganisation du travail, etc.
Mesures préventives à mettre en place
- Planifier : intégrer le risque chaleur dans le plan de prévention. Afficher les rôles et procédures.
- Adapter les horaires : commencer plus tôt, limiter les après-midis, prévoir des pauses toutes les 45 minutes.
- Refroidir les locaux : stores fermés avant 10 h, extinction des éclairages inutiles, ventilateurs ou climatiseurs mobiles, salle fraîche.
- Encourager l’hydratation : eau à 10-15 °C à disposition, 250 ml toutes les 20 minutes, fruits riches en eau.
- Équiper le personnel : vêtements légers, EPI anti-UV, chapeaux, crème solaire SPF 50+, gilets rafraîchissants pour tâches physiques.
- Former : briefing quotidien sur les signes d’alerte (maux de tête, nausées, confusion), appel 112 en cas d’urgence.
- Surveiller : mesurer la température 3 fois/jour, consigner les incidents dans un registre, informer le médecin du travail si nécessaire.
- Privilégier le télétravail : lorsque le poste le permet, le télétravail est une mesure efficace de prévention. Il permet d’éviter l’exposition à des locaux mal ventilés ou à des trajets pénibles en pleine chaleur. Il peut être déclenché temporairement par simple décision de l’employeur, sans modifier le contrat de travail.
Actions en situation critique
Si malgré les mesures prises la température dépasse 35 °C (ou 32 °C ressentis) et rend les conditions dangereuses, l’entreprise peut :
- aménager des pauses plus fréquentes ;
- réduire ou suspendre temporairement certaines activités ;
- envisager une déclaration de chômage intempéries via myGuichet.lu, après concertation avec le médecin du travail ou les délégués à la sécurité.
Cadre juridique
- Code du travail, articles L.312-1 à L.312-8 (sécurité et santé des salarié(e)s)
- Article L.331-1 du Code du travail (protection des salariées enceintes)
- Règlement grand-ducal du 4 novembre 1994 (conditions minimales dans les lieux de travail)
- Communiqués de l’ITM relatifs aux fortes chaleurs (dernière version disponible)
Recommandations pratiques
- Tester le plan canicule chaque printemps et former les équipes à son application.
- Prévoir un budget annuel pour le confort thermique (ex. : 30 €/salarié).
- Distribuer une infographie multilingue sur les signes de déshydratation et les bons réflexes.
- Prévoir des stocks d’eau et fruits pour 72 h en cas de canicule prolongée.